lundi, mai 29, 2006

Vagalame : une rencontre inattendue.

Ce texte fait suite à "Vagalame"

Une silhouette au visage masqué de rouge surgit au détour d'une ruelle sombre de Stormwind. Elle entre sans un bruit dans le bâtiment du SI:7 et en ressort une bonne heure plus tard. Vérifiant que personne n'est encore dehors à cette heure de la nuit, elle se dirige enfin vers la taverne la plus proche.

L'aube annonce à peine sa venue par quelques lueurs rosées au dessus des toits de la cité, qu'une jeune femme gracile sort de cette même taverne. Vagalame, toute de bleu vêtue s'arrête sur les marches pour contempler un instant la rue qui s'éclaircit progressivement, puis se rend d'un pas pressé vers le quartier nain et son fameux tramway. Elle saute prestement sur un des wagons un léger sourire aux lèvres. Elle était si impressionnée la première fois qu'elle a vu cet étrange animal métallique reliant les citées d'Iron Forge et de Stormwind. Elle ne s'attarde pas dans la capitale naine et prend un gryphon pour Menethil, but de son voyage. Dans sa poche, un parchemin portant le sceau du SI:7 lui donne rendez-vous au port de Menethil sans plus de détails.

Le soleil est déjà à son zénith quand Vagalame parvient enfin à destination. Elle s'attarde un moment sur le quai en bois, les yeux perdus dans la contemplation des vagues. La mer lui manque souvent... tout le temps.

«Pourquoi ne suis-je pas née homme ?! » songe t'elle.

Une voix bourrue l'arrache à ses pensées.
« Hey ! Mais c'est le p'tit mousse ! Fait bien une s'maine que j't'attend ! Sont pas rapides tes copains de Stormwind ! »
Interloquée, la jeune femme se retourne et se trouve face à ce qui semble être un vieux marin.
« Si je m'attendais ! Grigou ! Mais que fais tu ici ?! Je ne vois pas le bateau de mon père pourtant ! »
Le vieux marin éclate d'un rire sonore :
« Holà ! Doucement mon p'tit mon... heu... ma p'tite demoiselle, une question à la fois ! »
Il reprend d'un air embarrassé
« 's'cusez hein, j'ai du mal à m'faire à ton... vot'... enfin... »
Vagalame hausse les épaules en murmurant :
« Laisse tomber c'est pas grave...et puis abandonne le vous... je ne suis pas si différente... mais tu, tu le sais depuis quand ? »
« Et bien... quand nous avons repris la mer après vot'... ton débarqu'ment, les hommes comprenaient pas ! J'veux dire... not' mousse nous manquait. »
Grigou toussote pour cacher son embarras manifeste.
« Alors l'cap'taine, enfin ton père nous a tout dit ! Il s'en est fallut de peu que l'second déclenche la mutinerie ! »
« Mon père va bien ?! »
« Hoo oui oui, t'en fais pas ! L'vieux bougre a réglé l'problème à sa manière ! »
« Hum... je vois... duel sur le pont ? »
Le vieil homme acquiesce et sourit largement laissant apparaître quelques chicots noircis par le tabac. Vagalame lui sourit en retour, rassurée de comprendre qu'une fois encore, les talents d'épéiste de son père ne lui ont pas fait défaut.
« Grigou... pourquoi n'es tu pas avec lui ? »
Le marin soupire et murmure dans une quinte de toux :
« J'suis malade... naviguer c'trop dur maint'nant... j'suis d'venu un fardeau... »
Vagalame prend son vieux compagnon par le bras sans un mot par respect pour sa fierté de marin, et l'entraîne dans la taverne.

Le tavernier pose de temps à autres un regard noir sur la jeune fille qui discute avec le marin arrivé deux semaines auparavant. Il ne compte plus le nombre de rhum que ces deux là ont avalés, mais la jeune fille paye grassement.

"Si c'est pas honteux de voir cette fille boire de cette façon !! Ah si elle était restée à mon service, je lui aurais appris à se tenir moi !!..."
L'aubergiste s'interrompt en sentant le regard glacé que sa femme lui jette. Ne jamais se mêler de la vie des clients, telle est la règle. Un bref instant un voile de regret passe sur le visage de la femme. Comme elle aimerait avoir cette liberté ! Et cette jeunesse ! La jeune cliente semble avoir à peine dix sept ans... La femme de l'aubergiste secoue la tête pour chasser ces pensées et reprend son travail.

La table occupée par Vagalame et son vieil ami est quelque peu en retrait des autres, une bouteille de rhum quasiment vide trône en son milieu. Vagalame s'est tue depuis un moment, elle écoute Grigou lui raconter de façon imagée et à peine exagérée les derniers voyages de l'équipage dont elle faisait partie. Elle tient dans sa main, une lettre chiffonnée et couverte de taches, une lettre de son père.

Le bavardage ponctué de grands gestes de Grigou finit par se tarir, sa tête s'affaisse rapidement et un ronflement sonore se fait entendre. Vagalame couvre les épaules du vieil homme de sa veste et sort prendre l'air. L'après midi se termine et une odeur alléchante s'échappe des cuisines de la taverne.


Assise les jambes pendantes sur le ponton, la jeune fille relis pour la dixième fois au moins la lettre remise par Grigou. Le capitaine est inquiet, depuis quelques mois, les commandes sont moins importantes, les mers moins sures. La rumeur coure sur une éventuelle prise de contrôle des échanges maritimes par une sombre organisation. Ayant appris par un de ses nombreux contacts que sa fille travaillait pour le SI:7, il souhaiterait qu'elle en apprenne le plus possible sur le sujet.

Vagalame esquisse un sourire en imaginant la scène contée par Grigou plus tôt. Son père serait entré dans une colère noire en apprenant sa fuite de l'auberge. Elle imagine aisément la frayeur du délateur, des objets divers et variés auraient essuyés la fureur du capitaine et flotteraient maintenant quelque part entre Auberdine et Baie du Butin. Sa fille au SI:7 ! Il n'aurait pas décoléré pendant plus d’un mois, pour le plus grand malheur de son équipage. Mais Vagalame sait aussi tout l'amour que son père lui porte, et il semble avoir depuis accepté la situation, puisqu'il lui demande d'en savoir plus sur ce qu'il se passe.

"Hey ! L'mousse !" Hurle une vois essoufflée. "J'ai cru qu't'étais r'partie !"
Vagalame sourit doucement à Grigou.
"Je ne serais pas partie sans te dire au revoir, vieux mécréant"
Le marin se met à rire entre deux quintes de toux.
"Ma foi, t'es bien la fille du cap'taine ! Mais j'allais oublier... tiens c'pour toi..."
Grigou tient dans sa main, une petite caisse en bois qui semble vivante et la tend à Vagalame, un sourire en coin. Celle-ci ouvre légèrement le couvercle de la boite, pour jeter un coup d'oeil et éclate de rire.
"L'capt'aine a dit qu'c'est pour pas qu'tu nous oublies nous aut' en mer"
Vagalame se retient de sauter au cou du marin, mais dépose un petit baiser sur sa joue râpeuse. Si Grigou avait été moins sale, on aurait put voir une légère rougeur envahir son visage. La jeune fille ouvre largement la boite avant de la déposer au sol. Un rat tout blanc en sort, humant l'air avec méfiance. Vagalame tend sa main vers l'animal qui la renifle, avant de sauter sur le bras pour aller se nicher dans le cou de sa nouvelle maîtresse.
Grigou sourit de tous ses chicots. Il a hâte de revoir l'équipage pour leur raconter. Il ne dit pas que la plupart des matelots ont remués ciel et terre pour dégotter ce rat particulier. Il ne dit pas non plus le soin apporté par le capitaine à l'animal. Il observe la jeune fille murmurer des mots inaudibles à son compagnon à moustaches, en notant mentalement le moindre détail pour son futur récit.

L'aube éclaire Vagalame et Grigou sur le perron de l'auberge de Menethil. La jeune fille hésite mais finit par prendre le marin dans ses bras en retenant ses larmes. Grigou lui rend gauchement son étreinte en lui promettant de rester sur place pour assurer la liaison entre elle et son père. Elle semble si fragile en cet instant, que Grigou serait presque tenté de la retenir, l'enquête qu'elle doit mener peut s'avérer dangereuse. Mais son capitaine compte sur eux et il sait que Vagalame accomplira sa tâche sans faillir malgré son jeune âge. Un an déjà qu'elle est à terre, le marin est fier du chemin parcouru par son ancien mousse depuis.
"Merci pour tout Grigou... Je reviens dès que j'ai des nouvelles sur cette affaire..." murmure Vagalame
"Bonne chance ma p'tiote..." murmure en retour Grigou avant de rentrer prestement dans l'auberge afin de masquer son émotion.

En s'éloignant, le rat sur ses talons, Vagalame peut entendre "Quoi pas d'rhum à c't'heure ?!! Mais c'quoi c't'auberge !! Tavernier !!!". C'est avec un léger sourire aux lèvres qu'elle quitte le port de Menethil.



2 Comments:

At 1:44 PM, Anonymous Anonyme said...

Très belle écriture ma dame, un récit prenant.
Mes respects ^^

 
At 12:57 PM, Blogger Jolane said...

*s'incline en rougissant*

Merci, je suis flattée.

 

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